dimanche 16 mai 2010

Vers Auschwitz

"J'étais devenue insensible et inhumaine"

15 mai au matin. Nous sommes dans le bus qui nous conduit à Auschwitz. Chacun se prépare intérieurement à affronter cet événement. Chacun sait bien qu'il s'apprête à vivre le coeur de ce voyage, l'enjeu essentiel de la mémoire et de la transmission pour chaque génération. Sur la route nous écoutons Mme Kolinka qui livre à nouveau un puissant témoignage que nous n'oublierons jamais. Elle se livre avec une grande simplicité et s'adresse à nous comme si nous étions ses proches. Pourtant ses paroles sont terribles, elles décrivent l'horreur... Paradoxe que ce détachement dans le ton et cette gravité de l'histoire mêlés qui laisse sans voix. Comme toutes les personnes qui ont connu une grande souffrance, une expression revient souvent dans son récit: "immunisée contre la souffrance". Comme si sa déportation dans le camp de Birkenau l'avait, tel un vaccin, "immunisée" contre tout ce qui allait suivre. Mme Kolinka parle des travaux forcés, des coups reçus, de tous ces jours passés le ventre creux. "S'il y avait de l'herbe à Birkenau, nous l'aurions mangée". Elle parle du quotidien du camp, décrit dans le détail les événements, ces éléments concrets et précis qui seuls peuvent faire réaliser l'atrocité et la descente aux enfers que fut cet internement. Dans le camp tout était prémédité, planifié et programmé pour la mort. L'humain avait disparu. "Nous étions devenus des bêtes. On ne savait plus ce qu'était un regard humain". Ce témoignage nous place au cœur de ce voyage, de ce grave mémorial pourrait-on dire... Grâce à ce témoignage nous rentrons maintenant dans une démarche de relecture et de faire mémoire. C'est à nous maintenant de franchir, en ce jour de mai 2010, les barrières d'Auschwitz. Quelque soit notre âge et notre vécu, nous allons commémorer cette page de l'Histoire mais aussi dans la pudeur et le silence, faire mémoire de la nôtre...
"Celui qui ne fait pas mémoire de sa propre histoire est condamné à la revivre" George Santayana.

Pierre Vaccaro, salarié aux petits frères des Pauvres

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